Chronique du 28/12/2010
Oiseau de malheur... Écrit par Jean-Marie Poncelet Mardi, 28 Décembre 2010 15:14 |
C'était souvent comme cela que nos ancêtres appelaient ce merveilleux passereau qu'est le Jaseur boréal. Les invasions spectaculaires du Jaseur boréal sont connues de très longue date, notamment parce qu’elles furent associées, de manière très subjective, à des phénomènes aussi désastreux que les grandes épidémies de peste ou de cholera qui décimèrent les populations humaines jadis ou encore juste avant le début des guerres de 1914 et de 1940. Il n'en fallut pas plus pour que cet oiseau soit pourchassé et même massacré. Qui est-il? Mes rencontres... Un matin, j'allume mon gsm et, directement, je reçois un sms: ils sont là. Un copain, qui visitait une maison pour son boulot, en a découvert 7 mangeant des baies d'un cotonéaster; de plus, ce n'est pas très loin de chez moi... c'est à Grace-Hollogne. Ayant congé et mon épouse aussi, nous décidons d'y aller directement, ces oiseaux sont imprévisibles: ils peuvent rester des jours sur place ou bien simplement prendre des forces en mangeant des baies et puis repartir aussitôt. Mon matériel photo embarqué, nous sommes en route vers l'endroit indiqué, la tête pleine d'espoir. En chemin, je n'oublie pas de prévenir les copains susceptibles de faire ce court déplacement. Nous y sommes, mais malheureusement, les oiseaux ne sont plus à l'endroit indiqué. Nous cherchons pendant plus d'une heure scrutant la cime des arbres, les buissons, tous les cotonéasters de la rue sont analysés un à un. Aucune trace de ces oiseaux, j'interroge un habitant de la rue qui nettoyait son entrée de garage pour savoir s'il n'y avait pas une autre rue dans le voisinage qui portait le même nom que la sienne. Il me demande: "Qu'est-ce que vous cherchez?" Je lui dis être à la recherche des Jaseurs boréaux. Il me répond directement: "Des Jaseurs de Bohème, cela fait des années que je n'en ai plus vu, et je m'y connais." Je contacte un des copains qui cherchait également, mais lui non plus n'a rien trouvé. Déçus, nous reprenons le chemin de la maison, ce ne sera pas pour cette fois. Heureusement, quelques jours plus tard, je vois sur Internet qu'on a vu ces oiseaux à Jehay-Bodegnée. Ils sont une bonne trentaine. Ce sera peut être le bon jour pour moi. Je note les coordonnées GPS de l'observation, charge ma voiture avec mon matériel, voilà je suis en route. Dommage, je suis seul: Joëlle n'est pas disponible. En arrivant dans cette commune que je connais un peu, je passe devant le beau château de Jehay, fais encore quelques centaines de mètres et vois, sur un sorbier, une dizaine de Jaseurs s'empiffrant de sorbes. Quel beau spectacle! Le seul petit bémol est, qu'à cet endroit, il m'est impossible de garer ma voiture. A cet instant, un camion vient dans l'autre sens et fait s'envoler les oiseaux. Je les suis aux jumelles. Je me dirige dans la direction prise par les fuyards et les retrouve, dans une haie remplie de cenelles. Le temps de faire quelques photos, malgré le manque de lumière, ils sont de nouveau repartis vers un autre endroit de la commune. D'habitude ces oiseaux sont moins farouches. Je vais, pendant plus de deux heures, courir après eux. Je ramènerai quelques photos correctes, mais sans plus, la lumière n'était pas de la partie. Je rentre content malgré tout du beau spectacle que la nature m'a encore une fois proposé. A Vielsalm, cette fois-ci, on en signale une douzaine. Ceux-ci vont rester une dizaine de jours, près du lac des Doyards, j'aurai l'occasion d'aller leur rendre visite plusieurs fois. Les conditions de prises de vues seront fort variables. Un jour, un peu de soleil; un autre, de la pluie. Mais un véritable feu d'artifice orchestré par Dame Nature. Les oiseaux, ici, étaient assez tolérants avec les ornithologues et les photographes présents. Posés dans un bouleau, mangeant dans la haie d'aubépine et se laissant approchés à moins de 3 mètres, jouant avec les baies d'un sorbier comme de véritables jongleurs avant de les engloutir, se lavant et buvant dans de petites flaques juste à coté de la voiture qui me servait d'affut. Cette fois, je repars très content avec de la magie plein les yeux et des photos qui, j'espère, pourront rendre compte de cette émotion partagée par tous les copains et autres ornithologues présents. Pendant les jours qui suivront, on en signalera encore quelques-uns notamment à Aywaille, à Chênée et, le jour de Noël, ce sont sept oiseaux qu'on observe à Strée. Quelque chose au fond de moi me dit que ce n'est pas fini et que la fin de l'hiver nous réserve encore pas mal de surprises. Ouvrez l'oeil, car les oiseaux qui ont quitté la Scandinavie devront inévitablement y remonter. Je vous souhaite de pouvoir observer ce magnifique oiseau.
Bon début d'année 2011. |